La rencontre avec un autre monde
Hier j’ai regardé The Apprentice, le biopic sur les débuts de Donald Trump et la construction de sa carrière en tant que magnat de l’immobilier avec le projet fou de la Trump Tower.
Au début du film, on découvre un jeune Donald Trump tâtonnant, cherchant sa place.
Il collecte les loyers des locataires de l’entreprise familiale, une société immobilière sous le feu des critiques pour discrimination raciale. Il tente de s’intégrer au gratin new-yorkais, un monde dominé par des hommes impitoyables qui jouent selon des règles qu’il ne maîtrise pas encore.
Parmi eux, Roy Cohn.
Avocat sans scrupules, figure du maccarthysme, proche des sphères du pouvoir, il connaît les mécanismes invisibles qui permettent d’écraser la concurrence.
Le projet fou, le père, et le mentor
Donald Trump a un projet fou : celui de racheter l’hôtel du Commodore dans un quartier mal famé de New York pour en faire un immense hôtel de luxe. Il tente de faire ses preuves, mais est malmené par son père qui ne semble écouter aucune de ses propositions.
La rencontre avec Roy Cohn, c’est le début de tout : un mentor qui l’aide, l’écoute, le soutien. Roy Cohn lui montre toutes les façons dont il s’y prend pour arriver à ses fins - et celles de ses clients - coûte que coûte, que ce soit légal ou pas : chantage, écoutes clandestines, enregistrements illégaux…
“Comment est-ce que l’on gagne ?” est la question qui obsède le jeune Donald Trump, en rencontrant celui pour qui tout semble possible.
“Tu crées ta réalité”, répond Roy, avant de lui énoncer ses 3 règles :
Règle 1 : attaquer, attaquer, attaquer.
Règle 2 : ne rien reconnaître, tout nier en bloc.
Règle 3 : revendiquer la victoire et ne jamais admettre la défaite.
Le golden boy alors âgé de 28 ans boit les paroles de son père spirituel avec un seul but en tête : gagner.
Comment nos croyances façonnent notre réalité
À partir du moment où Trump adopte ces principes, quelque chose change.
Ce ne sont pas juste des conseils. Ce sont des croyances qui viennent s’intégrer au plus profond de son être, qui plus est transmises par une figure d’autorité. Il passe de “quelqu’un qui veut gagner” à “un gagnant”.
Autrement dit, il ne “fait” pas seulement, il “est” (strate identitaire).
Le cerveau humain n’interprète pas la réalité objectivement. Il filtre les informations pour confirmer ce qu’il croit déjà. Nos croyances façonnent notre réalité, nos choix, nos comportements, tout.
Autrement dit : nous ne croyons pas ce que nous voyons, nous voyons ce que nous croyons.
À partir de là, le comportement de Trump change :
Il n’essaie plus de convaincre, il impose.
Il ne cherche plus l’approbation, il attaque.
Il ne se demande plus s’il a raison, il fait en sorte d’avoir raison.
Et puisque ses actions changent, ses résultats changent.
Et plus ses résultats valident ses nouvelles croyances, plus elles s’enracinent profondément en lui, comme une prophétie auto-réalisatrice.
L’élève dépasse le maître
Un boulevard où tout semble possible s’ouvre devant de nouveau personne, de plus en plus redoutable, auto-centré, sans compassion, manipulateur. Roy Cohn l’observe, fier, mais il ne réalise pas encore que Trump est en train de le dépasser.
Dans un monde où il faut attaquer et gagner à tout prix, il ne peut y avoir qu’un gagnant.
À mesure que Donald Trump grimpe dans la hiérarchie du pouvoir, son mentor décline. Malade, affaibli, mis de côté par ceux qu’il avait servis, Roy Cohn tombe en disgrâce.
Trump, lui, ne regarde pas en arrière.
Il a appris la leçon : ne pas s’attacher, ne jamais reconnaître la défaite.
La vérité n’existe pas, seulement des récits
Le film se termine sur une scène clé. Donald Trump, devenu un magnat de l’immobilier, et plus encore, prépare son livre, The Art of the Deal.
Lorsque le journaliste interroge Trump sur la façon dont il est arrivé là, il ne parle pas de combat, de stratégie ou d’un mentor qui lui aurait appris les rouages du pouvoir.
Il efface Roy Cohn.
Il efface son propre apprentissage.
Et il proclame une nouvelle réalité :
On naît gagnant ou on ne l’est pas. Moi, je l’ai dans le sang.
C’est une déclaration absolue, un dogme.
Il ne dit plus “j’ai appris à gagner”, il dit “j’ai toujours été un gagnant”.
Le film ne se termine pas seulement sur une déclaration de victoire. Il se termine sur une réécriture complète du passé.
C’est l’aboutissement du processus psychologique.
Quand une croyance est adoptée suffisamment profondément, elle devient la seule réalité possible.
Elle n’est plus questionnée.
Elle devient un prisme à travers lequel on perçoit le monde.
Et le monde répond en conséquence.
Nous ne réagissons pas à la réalité elle-même.
Nous réagissons à l’histoire que nous nous racontons sur la réalité.
Et plus nous racontons cette histoire, plus elle devient vraie.
Alors, quelle est ta vérité ?
Si nous voyons ce que nous croyons, et non l’inverse…
Alors, quelles sont les croyances qui façonnent ton monde aujourd’hui ?
Quelles règles invisibles dictent tes actions, même sans que tu t’en rendes compte ?
Et surtout…
Si tu pouvais réécrire ton propre récit, que choisirais-tu de croire à partir d’aujourd’hui ?